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Etre journaliste fait de moi une meilleure entrepreneure

Etre journaliste fait de moi une meilleure entrepreneure

Le 19 septembre 2019

Flavie Deprez, directrice éditoriale de Carenews.com, le média des acteurs de l’engagement, nous livre son point de vue sur la relation entre l’entrepreneur et le journaliste.

« Parler entrepreneuriat et journalisme : mon sujet préféré, mais aussi un sacré défi. J’ai opté pour le concret. On me demande souvent comment je choisis mes sujets. On me reproche surtout de ne pas bien les choisir. Ou de ne pas avoir écrit le papier comme la personne interviewée l’avait pensé. Et comme je les comprends, ces entrepreneurs déçus… Parce que je suis la directrice associée d’un média qui est une entreprise et que je sais ce que c’est que d’être de l’autre côté du miroir… Paradoxalement, le fait d’écrire et de publier confère un pouvoir dont je n’ai toujours pas appréhendé les contours.

La Fondation Entreprendre me donne la chance de prendre la parole alors je ne voudrais parler que de ce que je connais, ou presque : les relations entre entrepreneuriat (social) et journalisme. Il est une règle sacrée, qui devient un peu une arche perdue pour les « nouveaux médias », qui veut qu’on ne puisse être entrepreneur et journaliste. Qui oppose l’intuition à la rigueur, les relations extérieures à l’objectivité, les revenus financiers à la probité.

La seule chose que j’affirmerai ici m’est très personnelle : être journaliste a fait de moi une meilleure entrepreneure. Être cheffe d’entreprise a fait de moi une meilleure journaliste. Pour carenews. Et je pense à tous mes consœurs et confrères des médias engagés qui ont ou ont eu les deux casquettes. J’espère qu’ils ne diront pas le contraire.

Si on met les mains dans le cambouis et qu’on évite le politiquement correct, il y a une vraie question : ce qui nous manque parfois venant des entrepreneurs ou de leurs attachés de presse et/ou communicants ? C’est de convaincre sans survendre, de présenter sans contraindre. Des galères, on en vit, comme journaliste, comme chef d’entreprise, comme personne. Dans le podcast Changer La Norme, qui est désormais soutenu par la Fondation Entreprendre, j’explique que les entrepreneurs sociaux manient les chiffres, connaissent des joies et des problèmes de trésoreries ou de relations humaines. Qu’ils ont « des amis, des amours et des emmerdes ». Et que c’est répondre sans langue de bois qui fait progresser les choses, qui est au cœur de l’information. C’est ce qui intéresse les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs. Et c’est là tout le point de mon propos : les journalistes ne sont pas tous des roquets investigateurs, ils peuvent comprendre quand ça va moins bien, ils respectent le off, ils savent compter, penser, ne confondent pas les vessies et les lanternes  et n’aiment pas être bernés (mais qui aime cela ?).

Et les entrepreneurs peuvent comprendre qu’un journaliste est contraint par une rédac, qu’il a des projets à mener, que lui aussi à des « canvas » et des « big pictures » pour lesquels il doit se démener.  Être entrepreneure m’a donné de la tendresse pour celles et ceux qui entreprennent aussi. Cela m’a valu aussi la confiance d’un certain nombre, j’imagine. Parce que je suis du sérail maintenant ; et sans doute pensent-ils que je ne les juge plus, ou moins. Être journaliste m’a rendue curieuse, m’a poussée à « benchmarker » naturellement toutes les problématiques, à ouvrir mon horizon, à creuser les discours et à répondre vraiment aux questions, qu’ils s’agissent de celles de confrères, de clients ou d’investisseurs.

 

Je ne crois en la sacralisation ni du métier de journaliste ni à celle des parcours d’entrepreneurs. Ils se ressemblent sans doute plus qu’ils le croient. Et ils ont en commun d’avoir des choix à faire, d’être libres tout en étant très contraints, d’avoir une vision. Il y a les relations de séduction et les relations de défiance, il y a les vouvoiements d’usage et les connivences cachées. Mais il y a surtout tant de ponts à construire entre l’entrepreneuriat qui fait l’économie de demain, qui a le pouvoir de changer les choses en bougeant les fondations d’un système très établi, et les médias, qui livrent de l’information et la font rayonner, pour donner aux individus le pouvoir d’agir en connaissance et en confiance. Être entrepreneure journaliste a orienté de façon surprenante ma manière de faire et d’interagir. J’ai grandi dans chacun de ces deux costumes, enfilés au hasard de la vie. Remplacer l’ambition par le bon sens, sans la reléguer au fond du placard, poser de vraies questions au lieu de provoquer, écouter au lieu de supposer et interroger le point de vue de l’autre au lieu de se fâcher, chercher à comprendre par intérêt plus que par vanité. Que tout le monde se rassure, c’est un objectif de vie dont la jauge n’est pas atteinte ! C’est cela sans doute qui confère à carenews et à la careteam (Shine Bright) de l’authenticité et qui participe à notre besoin de construire plus que de dualité. Et qui est la pierre angulaire de nos relations média-entrepreneuriat.

Amis entrepreneurs et journalistes, vous avez fait de carenews un lieu indispensable d’information, de lien et de diffusion pour l’économie sociale et solidaire. J’ai hâte d’écrire à vos côtés l’économie de demain. Et de changer la norme ».

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